Plus jeune, et encore maintenant, j’ai toujours eu ce sentiment un peu étrange d’être décalée, un peu extraterrestre. Une de mes anciennes camarades de classe me décrivait comme celle qui « était toujours penchée sur ses livres ». Mes souvenirs d’enfance sont majoritairement des moments de soif de connaissances, de promenade dans la nature pour étudier la botanique, découvrir la science. A trois ans, j’avais un jeu de cartes constituées de lettres en capitales que je savais très bien reproduire, je savais écrire mon nom et j’avais compris la numération jusqu’à 100. J’ai visiblement acquis très tôt le langage. Mais il ne m’était jamais venu à l’idée que je pouvais faire partie des « Hauts Potentiels ».
Ma scolarité s’est très bien passée, j’ai eu mon BAC mention bien et j’étais pratiquement toujours dans le peloton de tête, à part en seconde où j’étais en pleine crise d’ado, rébellion et tourments émotionnels constituaient mon quotidien, et la fac n’a pas été non plus une chouette période. Début de vie d’adulte, je me posais d’autres questions plus concrètes que je n’étalerais pas ici … J’ai également une certaine façon d’apprendre, très pratique, par l’exemple, qui n’est pas toujours en accointance avec la … pédagogie de la fac ? si toutefois on peut dire que la plupart des profs de fac sont pédagogues … bref, un autre souci que je ne développerai pas.
Je me suis donc souvent dévaluée, j’ai cru les mauvaises personnes, je faisais un complexe d’infériorité avec mon premier amour qui lui doit avoir un QI d’au moins 150 (large). Mais plusieurs fois, certains conseillers d’orientation, ou des collègues m’ont conseillé de passer ce test. Mais le vrai, encadré par un psychologue, pas celui qu’on trouve dans les magazines.
Je me suis longtemps cherchée, parcourant diverses théories, car j’ai un gros souci de gestion des émotions, jusqu’à aller loin, étais-je borderline ? asperger ? Jusqu’à ce jour de 2016 où une de mes ex m’emmène à une conférence qui parlait de ces fameux zèbres. Et là j’ai eu le déclic : cette pensée en arborescence, cette soif de connaissances, cette hyper sensibilité qui les caractérisent reflétaient ma propre vie ! Et si j’étais … surdouée ?
Un long chemin de prise de conscience
Le temps s’est écoulé jusqu’à ce que je me dise qu’il fallait vraiment que j’ai le cœur net. Trouver un.e psychologue habilité.e à faire passer les tests de QI est facile, Google est mon ami. J’ai pris rendez-vous en faisant d’une pierre deux coups : je voulais passer le test, le WAIS-IV, basé sur l’échelle de Wechsler, et poser également le diagnostic de l’hyper-sensibilité. Faire en bref un bilan cognitif qui dirait enfin qui je suis …
Le premier rendez-vous a été consacré à l’établissement de l’anamnèse : en gros elle a établi avec moi mon « mode d’emploi », et là elle n’a posé aucun doute sur mon hyper-sensibilité et mon hyper-émotivité.
Le deuxième rendez-vous a été consacré au test et a duré deux heures … alors autant vous prévenir : le test se passe en face à face, et il n’y a aucune fiche a remplir. Les test ont été très divers : des images à reconstituer avec des cubes-puzzles (très à l’aise), des suites de nombres à restituer de mémoire (dans l’ordre d’énonciation, ordre croissant, ordre décroissant …), suite de figures à terminer, éléments de dessins qui manquent, problèmes à résoudre mentalement, motifs à retrouver le plus vite possible, et mon talon d’Achille : les codes, mettre des signes correspondant à des chiffres. Petit à petit la fatigue me gagne force 10, je prends du sucre, bois de l’eau, c’est pas facile, et je termine l’épreuve les-si-vée. La psy trouve que je suis une bonne réfléchisseuse mais ne se prononce pas sur le verdict. Il faut qu’elle calcule tous mes scores.
Il n’y a pas que le QI dans la vie !
Troisième rendez-vous, verdict. Et la réponse est étonnante : mon QI est … invalide ! J’insiste … combien, combien ? J’ai un QI de 120, ce qui n’est pas si mal, et me pose dans l’étalonnage supérieur. Mais j’ai un gros déficit concernant la concentration : je réfléchis bien mais le traitement des informations me coûte énormément en énergie. Ça, je l’avais remarqué quand je passais mes leçons de conduite par exemple. Ou même dans la vie pro, quand je n’étais pas presta. J’ai besoin de longues poses, ce qui n’est pas bien vu quand on est dans une entreprise.
Elle détaille les 4 zones de performances :
– la compréhension verbale (ICV) qui est à 131 (zone très supérieure)
– le raisonnement perceptif (IRP) qui est à 118
– la mémoire de travail (IMT) qui est à 109
– la vitesse de traitement (IVT) qui est à 94
Et là, la psy me parle de mon IAG, qui fait « assouplit » certains coefficients déficitaires, et me dit que c’est ce chiffre-là qui doit être pris en compte pour mon diagnostic.
Mon IAG est de 129, et il est se situe entre 123 et 133, au 97eme rang percentile. Elle ajoute donc, qu’au vu des résultats, et de mon fonctionnement cognitif, on peut me classer dans la catégorie des « hauts potentiels ». C’est de justesse, mais j’en suis.
Maintenant concrètement, ça donne quoi ?
Hé bien je dirais que ça rassure, niveau identitaire, un peu comme quand j’ai compris et admis mon homosexualité … je sais que ça fait partie de moi. Maintenant que j’y réfléchis, mes meilleurs amis sont des gens qui « en ont », même si niveau amoureux, je me dévalorisais tellement que ça me rassurait d’être la plupart du temps avec des femmes « pas futées », mais je finissais par m’ennuyer avec elles. D’autant plus que même en se sachant pas malines, elle n’en n’étaient pas humbles, et pensaient avoir toujours raison (tacle personnel, pim). Je suis également rassurée, et sais que la machine marche plutôt bien. Mais je sais prévenir maintenant mes clients et quoi leur dire pour leur expliquer pourquoi je préfère le télétravail pour les missions de dev : je suis neuro-atypique et je sais comment je fonctionne, et comment je tire le meilleur de mes performances, et ça c’est cool 🙂